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L’article 595 du Code civil du Québec prévoit qu’une pension alimentaire pour enfant peut être réclamée rétroactivement à la date de la demande :

595. On peut réclamer, pour un enfant, des aliments pour des besoins existant avant la demande; on ne peut cependant les exiger au-delà de trois ans, sauf si le parent débiteur a eu un comportement répréhensible envers l’autre parent ou l’enfant.

Dans l’affaire Droit de la famille — 23364[1], la mère demandait au père de lui payer une pension alimentaire pour le bénéfice exclusif de l’enfant des parties et ce, rétroactivement au 1er janvier 2014. Afin d’obtenir la rétroactivité au-delà de la période de trois ans précédant sa demande, la mère devait démontrer au Tribunal un comportement répréhensible du père.

Le comportement répréhensible s’entend de tout acte du parent débiteur (celui qui doit payer une pension alimentaire) qui tend à faire passer ses intérêts avant le droit de l’enfant à une pension alimentaire d’un montant approprié.

Dans l’analyse de la question de la rétroactivité, le Tribunal tient compte du contexte global, de l’intérêt supérieur de l’enfant et de son droit fondamental aux aliments.

Dans l’affaire précitée, le Tribunal a conclu que le père a eu un comportement répréhensible quant au droit de son fils à une pension alimentation pour les motifs suivants :

  • Le 4 septembre 2009, Monsieur a pris l’engagement d’aviser la Mère de tout changement significatif dans sa situation financière et de transmettre une copie de ses déclarations fiscales le 1er juillet de chaque année. Il ne respectera ni l’un ni l’autre de ces engagements, devenus ordonnances lors de l’homologation par le tribunal du consentement qu’il a volontairement signé. Le profil LinkedIn de Monsieur démontre que dès août 2014, il travaillait à titre de financial risk manager auprès de [la Compagnie A];

 

  • Monsieur, qui a étudié à Ville A et à Ville C et qui est titulaire d’un baccalauréat et d’une maîtrise en finance, a toujours refusé de verser une pension alimentaire conformément à la Loi, privant ainsi son fils de ce à quoi il avait – et a – droit, préférant envoyer quelques montants de façon aléatoire;

 

  • En 2013, alors que Madame, dont la situation au Canada était précaire, faisait face à une possible expulsion par Immigration Canada, Monsieur a refusé son appel à l’aide pour que l’enfant bénéficie d’une carte d’assurance-maladie afin d’obtenir les services d’aide dont il avait grandement besoin vu les défis diagnostiqués par les évaluations pourtant transmises à Monsieur;

 

  • En blâmant la Mère que l’enfant était sa décision à elle, qu’elle n’a pas tenu compte de ses intérêts à lui et qu’en conséquence, l’enfant ne relève que de sa seule responsabilité, notamment financière;

 

  • En menaçant ensuite la Mère, lorsqu’il reçoit effectivement la demande procédurale en pension alimentaire, de se présenter à la Cour afin d’obtenir la garde complète de son fils, alors qu’il a ignoré ce dernier pendant des années, démontrant ainsi l’ampleur de ce qu’il est prêt à faire pour se soustraire de ses réelles obligations alimentaires.

Le Tribunal a donc fait droit à la rétroactivité de pension alimentaire demandée par la mère au bénéfice de l’enfant, mais uniquement à compter du 1er août 2014, date où le père a débuté un emploi.

[1] Droit de la famille — 23364, 2023 QCCS 846 (CanLII).